La Cour de cassation, haute juridiction française, par deux arrêts du 20 octobre 2015, a posé le principe selon lequel l’appel au boycott d’un pays tiers afin de critiquer la politique de cet État est illégal.
La Haute cour vient ainsi mettre fin à l’incertitude dans laquelle se trouvaient les autres juridictions de 1ère instance et d’appel pour trancher ce type de litige, hésitant selon les cas, entre liberté d’expression et provocation à la discrimination.
À l’origine de cette décision, un arrêt de la Cour d’appel de Colmar du 27 novembre 2013, qui avait condamné 14 militants du mouvement « Boycott désinvestissement, sanction » (BDS) à des dommages et intérêts et une amende pour avoir manifesté dans une enseigne de la grande distribution, appelant au boycott des produits provenant d’Israël et distribuant des tracts sur lesquels on pouvait lire « Boycott des produits importés d’Israël, acheter les produits importés d’Israël, c’est légitimer les crimes à Gaza, c’est approuver la politique menée par le gouvernement israélien». La campagne BDS lancée en 2005 par un ensemble d’associations et organisations palestiniennes appelle au boycott des produits israéliens, remettant en cause la politique d’Israël. Selon la Cour, les militants se sont rendus « coupables de provocation à la discrimination à raison de l’origine et de l’appartenance nationale d’un groupe de personnes, les producteurs et fournisseurs israéliens ». Elle ajoute que la provocation à la discrimination ne saurait entrer dans le droit à la liberté d’opinion et d’expression « dès lors qu’elle constitue un acte positif de rejet, se manifestant par l’incitation à opérer une différence de traitement à l’égard d’une catégorie de personnes, en l’espèce les producteurs de biens installés en Israël ».
La haute juridiction confirme cet arrêt venant ainsi lourdement sanctionner ces agissements désormais constitutifs d’une infraction grave, à savoir le délit de « provocation à la discrimination, à la haine ou à la violence envers une personne ou un groupe de personnes à raison de leur origine ou de leur appartenance à une ethnie, une nation, une race, ou une religion déterminée ». Les sanctions encourues sont un an d’emprisonnement et/ou 45000 euros d’amende.
Depuis 2010 la France a durci sa politique de poursuite via une circulaire adressée par Michèle Alliot-Marie aux parquets visant à apporter une « réponse ferme » à tout appel de boycott des produits israéliens. Désormais la haute cour vient donner une autre dimension et sanctionner ce type d’agissements. Ainsi désormais en France, seul l’État peut décider d’un boycott appelé alors embargo.
L’avocat de BDS compte contester cette décision devant la Cour de justice de l’Union européenne. Affaire à suivre.
Sources : www.lemonde.fr, « L’appel à boycotter Israël déclaré illégal », 06.11.2015 à 07h02, Jean-Baptiste JACQUIN ; www.legifrance.gouv.fr, Cour de cassation, criminelle, Chambre criminelle, 20 octobre 2015, N°14-80.020, N°14-80.021.