Le harcèlement de nature morale ou sexuelle n’est plus autant tabou qu’il l’a pu l’être des années auparavant, bien qu’il reste très douloureux et insupportable pour les personnes qui peuvent le subir.
Aujourd’hui une grande majorité de salariés savent qu’il existe des recours contre de telles pratiques qu’elles soient le fait d’ailleurs de leur employeur ou d’un autre salarié.
Le législateur et les tribunaux ont également œuvré pour réprimer le harcèlement moral et sexuel.
Les harcèlements moraux et sexuels sont réprimés à la fois par le code du travail (art.L122-46 & L122-49) et par le code pénal (art.222-33 & 222-33-2).
Mais qu’en est-il dans l’Administration publique ? Bien évidemment les victimes peuvent se tourner vers les juridictions répressives pour faire cesser le trouble, obtenir une condamnation et/ou réparation, la chambre criminelle de la Cour de cassation a déjà prononcée des condamnations, mais le peuvent-elles devant la juridiction administrative ?
Le harcèlement sexuel est défini par le législateur depuis la loi n°92-1179 du 2 novembre 1992, il a fallu attendre la loi nº 2002-73 de modernisation social du 17 janvier 2002 pour avoir une définition légale du harcèlement moral.
La loi du 2 novembre 1992 a introduit une modification dans la loi n°83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires dite Loi Le Pors puisque désormais son article 6 réprime le harcèlement sexuel.
La loi du 17 janvier 2002 a également modifié cette loi du 13/07/1983. Elle a ainsi créée l’article 6 quinquies qui vient réprimer le harcèlement moral.
En conséquence les fonctionnaires et les agents contractuels publics peuvent saisir le juge administratif pour des faits de harcèlement sexuel (qui ont eu lieu depuis 1992) et pour des faits de harcèlement moral (qui ont eu lieu depuis 2002).
Un arrêt du Conseil d’Etat en date du 24 novembre 2006 et se nommant Office National de la Chasse et de la Faune sauvage, a été plus loin, puisqu’il a condamné cet office pour des agissements constitutifs d’harcèlement moral alors même que les faits s’étaient déroulés avant 1992 donc alors que cette loi n’était pas applicable.
Il estime que « dans les circonstances de l’espèce, ce comportement a, dans son ensemble, et indépendamment même des dispositions de la loi du 17 janvier 2002 de modernisation sociale prohibant le harcèlement moral dans la fonction publique, qui n’étaient pas alors en vigueur, constitué une faute de nature à engager la responsabilité de l’Office national de la chasse et de la faune sauvage ».
Cette condamnation est fondée sur une argumentation détaillée du préjudice moral qu’a pu subir la requérante. Il constate ainsi qu’il y a eu des termes humiliants, vexatoires, remise en cause de ses compétences « sans que jamais une procédure de licenciement pour insuffisance professionnelle ou de sanction disciplinaire ait été engagée à son encontre ».
Les agissements ont duré pendant une période d’au moins six ans, et par « leur répétition, ont excédé les limites de l’exercice normal du pouvoir hiérarchique ».
Ainsi les agissements constitutifs de harcèlement moral sont réprimés efficacement. Néanmoins la réalité de ces atteintes doit être rapportée d’une manière très détaillée.
Aurélie VAUDRY