Dix personnes dont des promoteurs et des avocats d’affaire parisiens ont finalement été relaxées alors qu’elles étaient suspectées d’escroquerie. Ces personnes avaient intenté des recours abusifs contre des permis de construire à des fins d’enrichissement personnel.
Les prévenus étaient suspectés de s’être constitué de «faux intérêts à agir» dans le but de pouvoir déposer des recours en annulation contre des permis de construire devant les tribunaux administratifs en 1997 et 1998. La qualification pénale retenue était l’escroquerie ou la tentative d’escroquerie en «bande organisée».
Les faits sont les suivants : l’opération Bercy-Village avait fait l’objet d’un recours en annulation le 13 mars 1998 et une somme de 450.000 euros avait alors été versée par le promoteur pour obtenir le retrait du recours qui freinait ces projets immobiliers. De même, le 20 mars 1998, une plainte avait été déposée contre un recours pour le permis de construire du centre commercial Val-d’Europe.
Toutefois, le président de la 3e chambre correctionnel a estimé que l’escroquerie n’était «pas caractérisée et que retenir l’abus de procédure reviendrait à incriminer le mobile de l’infraction, ce qui est contraire à l’esprit du droit pénal». Après examen, le tribunal a également écarté qu’il «y ait eu atteinte aux intérêts vitaux des sociétés concernées».
Un constructeur peut en toute légalité indemniser un voisin d’un préjudice engendré par sa construction. Le recours n’étant pas suspensif, les promoteurs et les banques ralentissent le projet immobilier lorsque la validité du permis de construire est contestée devant le tribunal administratif. En effet, déposer un recours paralyse de fait un projet et fait perdre beaucoup d’argent au promoteur qui peut préférer dédommager immédiatement l’auteur en contrepartie de l’abandon de la procédure plutôt que d’attendre de longues années pendant lesquelles le projet est gelé.
Il faut par ailleurs, comme le préconise l’article L600-2 du Code de l’urbanisme, présenter une nouvelle demande dans le délai de six mois suivant la notification de la décision d’annulation, si l’on ne veut pas se voir opposer les dispositions d’urbanisme intervenues depuis la date de la décision annulée :
« Lorsqu’un refus opposé à une demande d’autorisation d’occuper ou d’utiliser le sol ou l’opposition à une déclaration de travaux régies par le présent code a fait l’objet d’une annulation juridictionnelle, la demande d’autorisation ou la déclaration confirmée par l’intéressé ne peut faire l’objet d’un nouveau refus ou être assortie de prescriptions spéciales sur le fondement de dispositions d’urbanisme intervenues postérieurement à la date d’intervention de la décision annulée sous réserve que l’annulation soit devenue définitive et que la confirmation de la demande ou de la déclaration soit effectuée dans les six mois suivant la notification de l’annulation au pétitionnaire. »
Cette disposition est une contrainte supplémentaire mais la pratique consistant à dédommager les auteurs d’un recours en annulation contre un permis de construire est courante et légale pour les promoteurs et le Tribunal a voulu par cette décision, le rappeler afin non seulement, d’éviter tout recours intempestif qui pourrait encombrer les tribunaux, mais aussi protéger le lobby des promoteurs.
Astrid DELPIERRE.