Le devoir de conseil est au cœur des relations entre le professionnel et le client. Cette obligation pèse sur le professionnel quel qu’il soit. Il peut s’agir du vendeur vis-à-vis du consommateur, du constructeur ou de l’entrepreneur vis-à-vis du maître de l’ouvrage.
Cette obligation est tacite et n’a pas besoin d’être expressément prévue au contrat ou dans le devis. Le client qui n’aura pas été ou incorrectement informé pourra s’en prévaloir sans qu’il soit nécessaire qu’il s’appuie sur un écrit.
Cette obligation est cependant lourde de conséquences d’un point de vue juridique lorsqu’elle n’est pas respectée.
Même si elle n’apparaît dans le Code civil qu’en filigrane, la jurisprudence est venue au fil des décisions rendues renforcer cette obligation de conseil ou d’information.
Cette évolution jurisprudentielle a été, en permanence, motivée par le souci d’inverser un rapport de force entre le professionnel et le client, de défendre la partie au contrat la plus novice en la matière et donc la plus exposée.
Le professionnel, du fait de sa connaissance technique, de son savoir faire, ne peut donc plus intervenir sans avoir, préalablement, informé son client sur la nature de son intervention sur les choix techniques qu’il effectue, sur les conséquences de ces choix et sur les risques qui peuvent en résulter.
La question de la preuve est centrale en matière d’obligation d’information ou devoir de conseil.
En effet, il sera extrêmement difficile pour un professionnel de rapporter, a posteriori, la preuve qu’il a effectivement et suffisamment informé son client.
C’est pourquoi, il est conseillé à tout professionnel de se prémunir de cette situation délicate, en remettant le jour de la signature du contrat ou du devis une notice explicative et technique sur son intervention, des instructions d’emploi, des mises en garde d’utilisation.
Par la suite, il pourra formuler des réserves lors des réunions de chantier, ce qui pourra s’avérer déterminant pour se défendre, le cas échéant.
Afin d’éviter toute contestation du client par la suite, il est primordial que cette information soit la plus claire et la plus loyale possible.
Le degré d’information exigé est même très important parce que le constructeur ou entrepreneur doit tout envisager.
Il doit anticiper tous les problèmes qui pourraient survenir, même ceux qui ne sont pas de son ressort ou directement dus à son intervention.
Ce souci d’information requiert une démarche réellement active du professionnel. Il ne doit pas seulement se contenter de répondre aux questions que pose le client mais il se doit d’anticiper son ignorance légitime en attirant son attention sur tel ou tel problème qui ne lui viendrait pas immédiatement à l’esprit.
En effet, il devra par exemple avertir le client des risques de vice ou malfaçon résultant des erreurs commises avant son intervention (Cass. Civ. 3e., 11 février 1998) ou des omissions dans les documents qu’on lui a remis.
De la même façon il devra informer son client sur les risques inhérents à la nature d’un sous-sol dans lequel s’implantera la construction.
On notera le caractère vaste de ce devoir de conseil qui s’impose au professionnel. Il doit tout envisager, il n’a pas le droit d’ignorer quoique ce soit.
L’obligation d’information s’applique aussi dans les relations entre vendeur professionnel et consommateur, en vertu de l’article L. 111-1 du Code de la consommation, qui oblige le professionnel à informer le consommateur des caractéristiques essentielles du bien ou du service.
Elle vaut également pour les négociations entre professionnels qui n’ont pas les mêmes compétences. Mais elle trouve sa limite lorsque vendeur et acheteur professionnels appartiennent à la même spécialité. (Cass. civ., 20 juin 1995)
Selon la jurisprudence, l’obligation de conseil s’applique non seulement aux vendeurs professionnels et aux fabricants, en particulier lorsqu’il s’agit d’un matériel dangereux, mais aussi aux installateurs (Cass. civ., 25 janvier 2000).
Le professionnel a donc en permanence une épée de Damoclès sur la tête et toute omission de sa part peut lui être reprochée ensuite.
Cependant, il existe tout de même des limites au devoir de conseil mais celles-ci ne sont pas nombreuses et correspondent à des situations très particulières.
Le professionnel sera dégagé de toute responsabilité relative à son devoir de conseil, en particulier :
– s’il a écarté sa responsabilité sur ce point dans l’accord conclu avec le client,
– si le client connaît les risques ou les inconvénients du bien vendu et qu’il est en mesure de le prouver,
– si le client l’informe de manière expresse qu’il a l’intention d’utiliser le bien pour un autre usage que celui pour lequel il est vendu,
– ou si la compétence du client qui est un professionnel lui permet d’apprécier les caractéristiques techniques du matériel vendu (Cass. com., 28 septembre 2004).
Dans les autres cas, à défaut de respecter ce devoir de conseil, cette obligation d’information, le professionnel engage sa responsabilité et en cas de préjudice subi par son client, il s’expose à devoir réparation, soit par la reprise du travail effectué à ses frais, soit par le biais d’une indemnisation.
Les juges peuvent également décider de prononcer la résolution du contrat, autrement dit sa disparition.
Si le client, de son côté, ne suit pas les conseils et les instructions du professionnel, il peut voir sa responsabilité également engagée, entraînant ainsi un partage de responsabilité, voire l’exonération de la responsabilité du professionnel.
L’article L. 111-1 du Code de la consommation prévoit que le commerçant est tenu d’informer le consommateur des caractéristiques du bien ou du service qu’il vend.
Cette disposition vaut également pour un marché conclu entre professionnels, notamment lorsqu’il s’agit de la fabrication, de la vente et de l’installation de matériels dangereux. L’étendue de l’obligation d’information est donc encore plus vaste lorsqu’elle concerne l’utilisation de matériels ou produits dits dangereux.
Si le devoir de conseil n’est pas observé et si une tromperie est avérée, le professionnel encourt jusqu’à deux ans d’emprisonnement et 37 500 euros d’amende.
Le professionnel est donc soumis à une obligation qui est lourde à supporter. Il doit sans cesse anticiper les litiges qui pourraient naître à la suite de son intervention. Sa meilleure défense est de se prémunir à l’avance en souscrivant une bonne assurance et en abreuvant son client de l’information la plus complète et la plus précise possible, tout en restant toujours clair.