Après l’abandon des charges contre DSK aux Etats-Unis, c’est en France, ce jeudi 13 octobre, que le procureur de la République de Paris a annoncé dans un communiqué de presse que la plainte pour tentative de viol déposée par Tristane Banon contre DSK en juillet dernier a été classée sans suite : le manque d’éléments de preuve suffisants a conduit le Parquet à clore l’affaire.
La justice a pris sa décision : faute de preuves suffisantes et concluantes, il n’est pas possible de donner suite à la plainte pour tentative de viol déposée en juillet 2011 par Tristane Banon. En droit pénal, la victime doit en effet rapporter le maximum d’éléments de preuves permettant d’établir que les faits litigieux qu’elle dénonce répondent aux conditions d’existence que pose la catégorie pénale sur laquelle elle se fonde pour porter plainte. Or, la Brigade de répression de la délinquance contre la personne, en charge de l’affaire, a reconnu une insuffisance des preuves matérielles rapportées par Tristane Banon pour pouvoir qualifier juridiquement l’existence certaine d’une tentative de viol. Devant cet insuffisance, et eu égard aux grands principes fondamentaux qui régissent la justice pénale, le Parquet, à l’issu de son enquête préliminaire, à décider de classer sans suite la plainte.
Néanmoins, si la plainte pour tentative de viol ne peut pas donner lieu à un procès, le Parquet a cependant reconnu l’existence d’une tentative d’agression sexuelle. En effet, en France, une distinction entre le viol et l’agression sexuelle est opérée par le Code Pénal : l’agression sexuelle est constitué de « toute atteinte sexuelle commise avec violence, contrainte, menace ou surprise », alors que le viol est retenu pour « tout acte de pénétration sexuelle, de quelque nature qu’il soit, commis sur la personne d’autrui par violence, contrainte, menace ou surprise. » Ainsi, le viol, bien qu’étant considéré comme faisant parti de la catégorie des agressions sexuelles, est soumis à un régime spécifique différent de celui s’appliquant à toutes les agressions sexuelles au sens large. Les juges affirment qu’en l’espèce, les faits permettent de reconnaitre une situation que l’on peut qualifier, au regard de la loi, de tentative d’agression sexuelle. Cependant, les faits litigieux sont prescrits : en matière d’agression sexuelle la loi fixe un délai de 3 ans qui cours à compter de la commission des faits pour porter plainte. Les faits se sont déroulés en 2003 et Tristane Banon ne les a dénoncés qu’en 2011, le délai de 3 ans s’est donc déjà écoulé. Une fois que le délai de prescription est expiré, la victime d’une agression sexuelle ne pourra plus avoir recours à la justice pénale pour tenter de faire condamner l’auteur de l’agression.
L’impossibilité pour Tristane Banon d’engager des poursuites sur le chef de la tentative d’agression sexuelle a relancé le débat sur la durée des prescriptions : beaucoup de personnes considèrent que le délai qui court de 3 ans est beaucoup trop restreint et devrait être rallongé à une durée similaire de celle pour la tentative de viol, soit 10 ans.
Ce classement sans suite de la plainte n’est pas pour autant synonyme d’un blocage définitif des recours : la décision du Parquet de classer sans suite une plainte peut être contestée auprès du procureur général de la Cour d’appel. Par ailleurs, le requérant peut aussi déposer une plainte avec constitution de partie civile. Cette nouvelle plainte est traitée par le Doyen des juges d’Instruction de Paris, qui, en tant que magistrat indépendant et après avoir examiner la recevabilité de la plainte, peut arriver à des conclusions différentes de celles du Parquet. Tristane Banon, à plusieurs reprises, a confirmé son intention de se constituer partie civile dans l’hypothèse d’un échec de sa plainte, affaire donc à suivre.
Jade Wu, juriste